La conservation, soit la protection de la nature pour les populations et le climat, implique souvent implicitement une transformation des relations entre les populations, la terre et les ressources. Cela peut nécessiter de nouvelles dispositions concernant les terres et les ressources, notamment en matière d’accès, d’utilisation et de propriété, ainsi que la mise en place de nouveaux systèmes de valeurs et de priorités. Ces efforts doivent prendre en compte la culture et la politique et interagissent souvent de plusieurs manières avec la dynamique des conflits. Différents types de conflits sociaux et civils et leurs héritages peuvent présenter des risques importants pour la conservation, et cette dernière peut par inadvertance aggraver ou déclencher différents types de conflits, affectant négativement les communautés et sapant ses propres objectifs. Néanmoins, compte tenu du rôle essentiel de l’environnement pour les moyens de subsistance, la santé et la culture, la conservation peut également favoriser la paix positive ainsi qu’une société prospère sans violence.
Conservation International (CI) s’efforce de préserver le climat, les écosystèmes et la biodiversité de la planète, qui sont essentiels au bien-être de tout être humain. Au cours des dix dernières années, CI a cherché à améliorer sa compréhension de la relation entre la conservation et la sensibilité aux conflits afin de maintenir son engagement en faveur des droits humains et de la nature. L’organisation en a tiré quelques leçons:
- Comprendre les situations, y compris l’architecture locale ou coutumière de promotion de la paix: des analyses minutieuses peuvent aider à identifier les bonnes institutions ou structures avec lesquelles collaborer pour gérer ou transformer les conflits socio-environnementaux. Avec la prise en compte croissante des rôles et des connaissances des peuples autochtones et des communautés locales dans la gestion des terres et des fonds marins, cette compréhension peut aider le secteur de la conservation à identifier les opportunités de renforcer les partenariats pour provoquer un impact durable.
- Reconnaître l’exclusion socio-économique ou politique: les femmes, par exemple, subissent souvent de manière disproportionnée les effets négatifs des conflits, du changement climatique et de la dégradation de l’environnement. De l’analyse du contexte à la conception et à la mise en œuvre des projets, en passant par le suivi et la responsabilisation, une perspective intersectionnelle peut aider à prévenir les dommages et à promouvoir un accès équitable aux retombées positives. Cette sensibilité aux dynamiques au niveau des ménages, de la communauté et de la société dans son ensemble peut mettre au jour des opportunités de soutien de la transformation des conflits et une amélioration de l’approche du genre. L’objectif serait d’obtenir de meilleurs résultats en matière d’acquis sociaux ou de gouvernance et une paix durable.
CI a capitalisé sur ces leçon et d’autres méthodes programmatiques en intégrant la sensibilité aux conflits et la construction de la paix environnementale à sa mission, en soutenant un personnel dévoué et en collaborant avec divers « champion·es » ou partenaires au sein de l’organisation et au-delà. CI a également appris que certains outils déployés dans le cadre de la promotion de la paix ou de la gestion des conflits peuvent aider les organisations de conservation à se restructurer. Alors que certains types de conflits peuvent être destructeurs, leur résolution peut mettre en lumière des perspectives nouvelles pouvant entraîner des changements positifs. Les participant·es à un programme pilote sur la gestion des conflits socio-environnementaux au Brésil l’ont remarqué: «Les conflits peuvent être une source de croissance, de développement ou d’apprentissage, car les idées issues des tentatives de résolution des conflits peuvent apporter des solutions.»